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Marine Le Pen: les sondages peuvent-ils empêcher l'orage ?

Publié le par redskinhead de France

marine-le-pen_propagande.gifLorsqu’on croit à la magie, alors la magie peut fonctionner. En psychologie on appelle cela d'ailleurs la “pensée magique”, on se persuade d'un lien fantasque, chimérique, entre des événements sans relation causale,scientifique, mais cela explique les choses plus facilement qu'en ayant recours à la science.


Tout le monde connaît l’effet placebo par exemple:l’homéopathie en est le meilleur exemple : la simple suggestion, le fait d’être persuadé de prendre un médicament peut suffire à guérir.

L'effet inverse du placebo existe aussi c'est le principe “nocebo”, si l'on de persuade que quelque chose va nous rendre malade, nous le devenons.


En ce mois de mars 2011, parce qu’un sondage l’a décrété, nous serions donc dans une situation atroce et sans espoir : le temps s’est brusquement rétréci, avril 2012 c’est demain, et l’année qui va s’écouler est sans importance, l’évènement c’est la présidentielle de l’année prochaine.


En ce mois de mars 2011, l’Histoire s’est refermée en boucle, nous dit on : ces dix dernières années n’ont rien changé, et avril 2012 sera comme avril 2002.


En Lybie, la bourgeoisie locale acculée bombarde le prolétariat. Ici, il s’agit d’abord de détruire psychologiquement sa capacité de résistance et de création offensive.


Face à ces deux sondages et à la déferlante médiatique qui a suivi, la première des nécessités est d’analyser la situation objective , le rapport de forces concret, et les raisons de la propagande mise en place ces derniers jours


 Ces sondages ont-il appris aux prolétaires en lutte des choses qu’ils ne savaient pas ?


Depuis le milieu des années 2000, la progression du fascisme est une donnée incontournable et évidente : l’ensemble du discours politique et médiatique s’est décalé vers l’extrême droite, qu’il s’agisse du racisme, de l’antisémitisme ou du sexisme. Ce décalage s’est également ressenti en ce qui concerne le discours tenu par la bourgeoisie contre le mouvement de classe.


L’appel à la brutalité totale contre les minorités et l’ensemble des prolétaires en lutte s’est banalisé : le chroniqueur le plus en vue de ce pays Eric Zemmour en est l’exemple parfait, et donc même dans les émissions de « divertissement », l’offensive culturelle fasciste s’est installée.


Contrairement à ce que pensait l’extrême gauche, ce décalage n’a pas entraîné une désaffection des structures fascistes organisées mais au contraire leur développement exponentiel.


La regénération du Front n’en est qu’un aspect : en effet, le fascisme organisé ne se limite pas à ce parti, mais existe par une myriade de collectifs et d’initiatives culturelles permanentes, au moins aussi importantes.

Depuis la révolte populaire dans les banlieues en 2005, chaque nouveau pas du mouvement de classe entraîne en réaction un pas en avant de la bourgeoisie vers le fascisme.


Marine Le Pen n’était pas une star des médias, pas à ce point jusqu’en automne par exemple : mais jusqu’au mouvement contre la réforme des retraites, il semblait que l’offensive sécuritaire et paranoïaque pouvait être menée sans que les fascistes organisés soient forcément utiles dans ce processus.


Seulement, malgré le bourrage de crâne sur la « menace islamiste » à propos de la burka, malgré un été 2011 ou tout a été fait, et notamment l’offensive sur les Roms,pour que le prolétariat en France se laisse diviser, au contraire, un mouvement uni et offensif , construit autour de la réforme des retraites a réussi à émerger et a désorganisé la production pendant des semaines entières.


A partir de là, il était logique et impératif que la bourgeoisie se tourne vers l’option fasciste : détourner la colère du peuple, la neutraliser en tenant pour acquise sa compréhension du capitalisme, qui le vaccine contre les solutions social démocrates. Il fallait mettre en avant les fascistes organisés et leur anti capitalisme de façade, pour que le poison raciste et antisémite puisse à nouveau pénétrer les rangs prolétaires, porté par des gens que l’on présente comme des «ennemis du système ».

C’est ce qui a été fait en remettant le Front sur le devant de la scène.

Cela fonctionne en partie, mais il n’y avait pas besoin de deux sondages pour s’en rendre compte.


Marine Le Pen et son parti sont-ils différents de ce qu’ils étaient par le passé ?


Tout le discours médiatique et politique classique sur Marine Le Pen est fondé sur cette ritournelle, que tous les militants d’extrême gauche reprennent, sans donner un instant le moindre commencement d’argument objectif ou historique.

Toute cette analyse est un mensonge.


Le Front a toujours eu des militants issus des minorités, et les a toujours mis en avant, en son temps Farid Smahi était donné en exemple de la mutation fasciste comme l’est la jeune transfuge du NPA Vénussia Myrtil aujourd’hui.

Le Front a déjà tenté par le passé de se positionner sur une posture syndicale, et est parvenu à prendre le contrôle de sections entières dans les années 80-90 .

Le « discours social » a également été une option parmi d’autres prônée dans les décennies précédentes : la « préférence nationale » présentée comme un moyen de garantir aux « français de souche » un accès aux droits sociaux a été une des clefs de voûte des victoires municipales remportées par le Front dans les années 90.


paranoia-front-national.jpgQuant à la prétendue nouveauté extraordinaire que serait le discours « anti-islam », qui aurait remplacé le discours raciste classique, il a de quoi faire pleurer de rire les membres des minorités qui vivent l’offensive raciste au quotidien depuis les années 80 : qui a pu oublier les campagnes électorales ou les murs des villes et des villages étaient tapissés d’affiches de femmes voilées, avec en dessous les slogans du Front ? Qui a oublié les affiches du FN repompage de la propagande nazie qui disait s'il y avait des millions de chômeurs, c'est parce qu'il y avait des milliers d'immigrés?

Lequel ou laquelle d’entre nous vit comme une nouveauté qu’on nous mette sur le dos la souffrance des moutons que nous égorgeons dans les baignoires de nos HLM ? Qui a oublié ces années où aller acheter une bouteille de gaz nous exposait immédiatement au regard soupçonneux et inquiet de nos concitoyens, voire à des contrôles de police, parce qu’être arabe signifiait déjà être un dangereux terroriste islamiste sanguinaire ?.


Il n’y a donc aucune « euphémisation » du discours lepéniste, et l’utilisation de l’islam comme de la laicité menacée n’est pas nouvelle non plus.


Marine Le Pen ne se dédiabolise pas elle-même, ce qui se produit est tout autre : c’est le discours fasciste qui est dédiabolisé, banalisé et repris par une partie grandissante de la bourgeoisie.


 Quelle est la nouveauté, dans ce cas , et quel est le pas décisif franchi ces derniers jours ?

Il réside dans l’aboutissement d’une logique mise en œuvre depuis plusieurs semaines, dont nous avions déjà évoqué la progression.


Dans un premier temps, l’aspect pogromiste du fascisme a été banalisé par les médias : l’incendie de domiciles de particuliers maculés de croix gammées a fait l’objet de quelques brèves sans lendemain, alors qu’il s’agissait évidemment d’un pas décisif dans la violence.


Dans le même temps, deux campagnes à objet prétendument « littéraire » battaient leur plein :d’un côté, la réhabilitation d’un obscur écrivaillon raciste , Jean Raspail et de son ouvrage « allégorique » sur des millions d’immigrés arrivant en bateau et entraînant la destruction de la « civilisation France », de l’autre le buzz autour de la célébration annulée de Celine comme gloire nationale et la propagation du discours selon lequel l’antisémitisme hallucinatoire et pogromiste serait un « détail » dans la pensée et l’œuvre d’un individu.


paranoia-copie-1.jpgSimultanément, l’épouvantail de la « grande invasion » qualifiée par certains médias et hommes politiques d « exode BIBLIQUE » a été agité comme une apocalypse toute proche pour l’Europe, un déferlement incontrôlable dont la cause serait les révolutions en cours et la chute des dictateurs alliés des dirigeants européens.

 

Très logiquement Marine Le Pen s’est engouffrée dans cette brèche en proposant ce que les fascistes ont toujours proposé : repousser les « clandestins dans les eaux internationales », c’est-à-dire très clairement, jeter les Arabes à la mer, en cette occurrence précise.


Mais ce qui aurait constitué un scandale autrefois par sa crudité, n’en a pas été un, puisque depuis des mois, les médias répètent que le discours frontiste est beaucoup moins virulent, et beaucoup plus démocratique qu’avant , et quasiment dénué de racisme.


D’où la conclusion, faite par certains membres de l’UMP, comme Chantal Brunel : proposer de jeter les Arabes à la mer, c’est tout à fait démocratique, c’est un objet de débat en soi. C'est le principe du poisson-pilote: on envoie un message à l'opinion publique via un sombre porte-parole et on attend les réactions, elles sont mauvaises ont désavoue le poisson-pilote, elles sont bonnes, on célèbre le poisson-pilote. La députée Brunel a fait office de test.

Et, de fait, AUCUN parti politique officiel ne refuse les termes même de ce débat. Aucun parti n’affirme ouvertement que le péril migratoire n’existe pas, que les immigrés éventuels ne sont pas un problème . On réfute le nombre éventuels de bateaux, on propose des solutions plus humaines que les rejeter à la flotte, mais c’est tout.

Et ce sondage vise simplement à encourager la libération de la parole pogromiste, notamment chez les prolétaires déjà trompés par les fascistes.


Derrière l’offensive idéologique, quelle réalité de classe ?


Pour comprendre, il faut naturellement cesser de penser avec les catégories fascistes et capitalistes, dans TOUS les domaines.

Et notamment en ce qui concerne le tournant pris dans la lutte des classes mondiale cet hiver : si l’on parle comme les médias le font de la révolution « arabe », on est déjà pris au piège sémantique.

En réalité, les mouvements de classe se sont enchainés mondialement , avec une dimension inédite : blocage réussi d’une bonne partie de la production en France à l’automne, contamination en Angleterre juste après avec un mouvement imprévu et un caractère international notamment symbolisé par le slogan « Grève générale « crié en Français.

En Tunisie, ce sont d’abord des revendications économiques qui ont émergé, au sens noble du terme, la révolte a été celle du prolétariat contre une dictature qui l’affamait et le précarisait, pas celle d’une classe moyenne uniquement préoccupée de droits démocratiques.

En Egypte, Moubarak est tombé au moment ou les grèves dans certains secteurs clefs menaçaient non seulement l’économie égyptienne mais aussi le capital international, et ce n’est pas seulement les manifestations du Caire qui ont changé la donne, mais la menace de la grève insurrectionnelle.


Un peu partout , les mouvements de classe en cours présentent désormais cette triple composante : économique, politique, insurrectionnelle.


Mondialement, la production capitaliste subit des avaries importantes, des chocs successifs, des interruptions temporaires : celles-ci ne sont pas tant une menace matérielle qu’un terrible coup psychologique pour la classe dominante.

Toutes les barrières mises en place semblent bien fragiles brusquement : des Bourses sont contraintes de fermer plusieurs semaines, en catastrophe on doit négocier avec de nouveaux interlocuteurs pour l’approvisionnement en pétrole dans certaines zones, il devient nécessaire de sacrifier brusquement une partie de ses alliés politiques dans certains pays, face à la colère des peuples.


Le social-fascisme mondial, qui incarnait, il y a encore quelques semaines une alternative de maintien de l’ordre capitaliste devant la montée du prolétariat offensif subit d’énormes défaites de crédibilité : la prétendue gauche révolutionnaire d’Amérique Latine, incarnée par Chavez ou Castro montre son vrai visage aux prolétaires en appuyant Kadhafi. Les tenants de l’islam politiques, incarnant jusqu’ici la rébellion à l’Occident, se retrouvent à la traîne dans les pays en révolution, et ne peuvent plus cacher leur dimension bourgeoise et répressive dans les pays ou ils sont au pouvoir, comme en Iran.


La nécessité d’un cordon sanitaire idéologique en Occident devient donc absolue pour la bourgeoisie : le contrôle des grandes métropoles européennes notamment en dépend.


Il FAUT que les prolétaires sur le sol européen ne franchissent pas le pas de la conscience de classe qui pourrait entrainer une crise révolutionnaire aigue.

Pour cela trois éléments pyschologiques sont nécessaires : la haine raciste qui empêche l’identification avec les prolétaires combatifs et révolutionnaires des autres pays, le poison antisémite qui bloque toute analyse cohérente de la nature du capitalisme et détourne la colère vers des boucs émissaires, le pessimisme démobilisateur qui empêche de croire en la possibilité immédiate de la prise du pouvoir par le prolétariat.

Le coup de massue médiatique et politique asséné avec l’outil Marine Le Pen correspond très exactement à ces trois objectifs.

  • Le poison raciste : au regard de tout ce qu’on vient de dire, la signification réelle du « débat » sur les bateaux plein d’ « arabes » que chaque Français doit voir comme une « menace » à traiter plus ou moins humainement est évidente.

C’est la révolution qu’on veut jeter « hors des eaux territoriales », comme a dit Marine Le Pen. C’est la conscience de la seule vraie division dans le monde capitaliste qu’on veut nous empêcher d’atteindre avec le sentiment ET l’analyse nationaliste.

  • Le poison antisémite : la revendication historique du Front a été reprise par Eric Zemmour et applaudie par l’UMP. Supprimer les lois mémorielles et anti-racistes, libérer la parole sur l’apologie…du fascisme triomphant des années 30.

La bourgeoisie cherche à en finir au plus vite avec les dernières entraves qui briment les structures fascistes organisées dans leur propagande quotidienne.

  • La propagation du pessimisme et du défaitisme dans le prolétariat en lutte : nous sommes galvanisés à juste titre depuis des semaines par les victoires remportées par les nôtres de l’autre côté de la Méditerranée. Nous avons-nous aussi l’envie de renforcer nos luttes, et surtout celle de les mener à leur terme, de ne pas lâcher, car la ténacité des masses égyptiennes et tunisiennes nous a montré que le cours de l’Histoire peut bien être changé par notre capacité à tenir la rue UN jour de plus.

Alors ces derniers jours, l’offensive médiatique sur la soi disant domination des idées fascistes, sur leur avancée inexorable vers le pouvoir vise à nous paralyser, à nous replier à nouveau sur une analyse de classe franco-française, à nous compter avec inquiétude, à nous faire sentir effroyablement isolés et minoritaires, enfermés dans nos frontières.

Une fois cette analyse faite, l’enjeu apparait clairement, et l’importance du moment et de nos choix aussi.


Marc_Chagall_Moise_devant_le_Buisson_ardent_Detail_les_arme.jpgLa bourgeoisie cherche à imposer une position défensive au prolétariat en lutte : si nous nous sentons minoritaires et acculés , nos stratégies s’en ressentiront. Nous n’irons pas de l’avant, mais nous chercherons au mieux à nous réfugier dans l’impasse social démocrate : déjà, le vote utile nous est proposé, déjà de grandes manifestations de protestations indignées sont discutées par les centrales syndicales, par la gauche, mais aussi par les autorités religieuses.

La « défense de la démocratie » face au « fascisme » va être le grand mot d’ordre, lancé par des hommes politiques et des organisations dont l’activité principale dans le mouvement de classe consiste à bafouer la démocratie REELLE, c’est-à-dire à empêcher toute expression autonome des prolétaires au profit de la domination de la petite bourgeoisie comme nous l’avons vu à propos des bureaucrates syndicaux qui passent au Front National, mais aussi dans notre analyse du social-fascisme incarné par certains leaders d’extrême gauche.

Mais l’analyse matérialiste du rapport de forces entre les classes doit au contraire nous conduire à une offensive POSITIVE et RUPTURISTE sans précédent : plus que jamais, la bourgeoisie n’est qu’un tigre de papier dont les vociférations sonores cachent un état de faiblesse sans précédent depuis des dizaines d’années.


Le tigre acculé est prêt à tuer pour sauver sa peau, cependant. Ce n’est pas le moment de le laisser bondir en baissant les armes.

Fascisme ou socialisme, l’alternative est unique, mais la seconde option est à portée de nos mains, si nous savons les tendre

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R
<br /> si je ne me trompe pas c'est Rosa Luxemburg qui a la première utilisée la formule "socialisme ou barbarie", celle-ci garde toute son actualité mais gardons à l'esprit que la social-démocratie a<br /> dévoyé le beau mot socialisme. quant à la bourgeoisie elle n'a elle eu de cesse de trainer dans la boue le terme communisme et communiste.<br /> il ne s'agit nullement d'abandonner ces termes comme l'ont fait tous les trotskistes mais il nous faut au contraire lever toujours plus haut les couleurs et assumer ce que nous sommes : des rouges<br /> !<br /> <br /> <br />
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